La loi du 05
février 2005, qui entrera en vigueur au plustard le 30 septembre 2005
La médiation avait
déjà reçu une consécration
légale lors de l’adoption de la loi relative
à la médiation familiale le 19 février
2001. Cette fois, le législateur lui réserve une
place de choix, puisqu’il crée pour elle une
septième partie dans le code judiciaire,
intitulée « La médiation » et
lui offre, par là, la même
légitimité que la procédure judiciaire
et l’arbitrage.
La loi ne définit pas la médiation.
Dans l’exposé des motifs, la médiation
est présentée comme un processus de concertation
entre parties désireuses d’y recourir sur une base
volontaire (1). Il faut distinguer trois types de
médiations. Les deux premiers sont relevés dans
la loi :
- la médiation judiciaire
: un médiateur agréé par la commission
fédérale de médiation est
désigné par le juge, à la demande des
parties ou de sa propre initiative mais avec l’accord de
celles-ci.
- La médiation volontaire : un
médiateur agréé par la commission
fédérale de médiation est choisi
librement par les parties, qui signent un protocole et tentent une
médiation. La médiation volontaire a lieu alors
que les parties sont ou non déjà en
procès.
- Et le troisième, implicitement, que nous qualifierons de médiation
« libre » : un médiateur est
choisi librement par les parties sans qu’il ne doive
répondre aux exigences de la loi. C’est le
modèle qui préexistait avant la loi et qui repose
entièrement sur la volonté des parties.
Sous réserve de certaines dispositions, la loi ne
s’applique qu’aux médiations qui se
tiendront dans le cadre d’une procédure judiciaire
ou dans un cadre volontaire mais à l’issue duquel,
les parties souhaitent se réserver le droit de donner une
force exécutoire à l’accord
passé, ce par le biais d’une homologation par le
juge.
Sans imposer que toutes les médiations répondent
à ses critères, la loi réserve
cependant l’avantage de la procédure
d’homologation simplifiée aux parties qui ont fait
appel à un médiateur agréé.
Généralisation
de la médiation à d'autres matières
que le droit familial
Alors que la médiation était
réservée par la loi aux conflits familiaux, la
nouvelle loi innove en étendant son champ
d’application à un large éventail de
litiges. Le législateur est parti du constat que le
processus de médiation est pertinent dans tous les domaines,
chaque fois que les parties acceptent d’y recourir de bonne
foi.
L’expérience a démontré
qu’elle était particulièrement
adaptée à tous les conflits relationnels
(famille, propriété, voisinage, milieu de
travail, relations commerciales, difficultés en cours de
construction conflits entre actionnaires ...).
Garanties
offertes par la loi
Le législateur a voulu doter de garanties juridiques
essentielles les médiations soumises à
l’homologation du juge. Ceci afin
d’alléger sa tâche, d’une
part, et d’autre part afin de l’encourager
à prescrire la médiation en toute confiance.
Ainsi, la signature d’un protocole de médiation,
la consignation par écrit de l’accord de
médiation, le respect des règles de
confidentialités et l’agréation du
médiateur sont des dispositions qui répondent
à ce souhait.
Le médiateur devra être compétent,
garantir la sécurité juridique de ses
écrits ; il devra être formé aux
techniques de la médiation et son indépendance et
son impartialité ne pourront être mises en doute.
En offrant ces garanties, l’allégement de la
tâche du juge et par la même la
résorption de l’arriéré
judiciaire sont engagées.
La Commission fédérale de médiation,
sera composée de représentants de tous les
acteurs de la médiation (deux notaires, deux avocats et deux
membres qui ne sont ni avocat, ni notaire).
Elle sera chargée notamment de
l’agréation et de la formation des
médiateurs. Cette Commission sera totalement
indépendante, et aidée dans sa mission par trois
sous-commissions spécialisées. (familiale, civile
et commerciale et sociale). Elle bénéficiera de
l’appui logistique du Service Public
Fédéral de la Justice.
La
médiation, un processus accessible à tous
La médiation sera accessible aux plus démunis. Le
Code judiciaire a été modifié en ce
sens. Les frais et honoraires des médiateurs pourront
être pris en charge par l’assistance judiciaire,
tant dans le cadre de la médiation judiciaire que dans le
cadre volontaire.
Toutefois, étant rémunérés
par l’Etat, les médiateurs intervenant dans le
cadre de l’assistance judiciaire devront être
agréés par la Commission de médiation.
Un arrêté royal fixera le montant des honoraires
et frais qui seront pris en charge par l’Etat.
Enfin, l’arrêté ministériel
du 20 décembre 1999, fixant les modalités de
paiement des avocats qui interviennent dans le cadre de
l’aide juridique de 2ème ligne sera
modifié afin que les prestations des avocats qui
interviennent comme conseils des parties à une
médiation soient inscrites dans la liste des points.
Innovations
intéressantes
Le respect de la clause de médiation
Le législateur a relevé l’importance
des engagements pris contractuellement par les parties avant la
survenance même d’un litige en prévoyant
que le juge ou l’arbitre puisse suspendre l’examen
de la cause si les parties n’ont pas préalablement
tenté la médiation alors qu’elles
s’y étaient engagées (1725 C.j.
nouveau).
La proposition de médiation vaut mise
en demeure
Quel que soit le moment où la médiation est
proposée par une partie à l’autre, si
elle est faite par voie recommandée et qu’elle
contient la réclamation d’un droit, la proposition
de médiation aura les effets d’une mise en demeure
(art. 1730§2 C.j. nouveau).
Le législateur a assimilé cet envoi
recommandé à une mise en demeure pour que le
demandeur de médiation puisse à la fois marquer
le point de départ du cours des
intérêts sans que le contenu de sa lettre ne soit
susceptible de heurter de front la partie adverse.
Suspension de la prescription (1730 par.3
nouveau)
Autre effet de la lettre contenant une proposition de
médiation : elle suspend la prescription. Ici aussi, le but
est de favoriser les médiations en permettant aux parties
qui souhaitent la tenter de ne pas craindre l’imminence de
l’expiration d’un délai de prescription
extinctive de leur action.
Cette suspension sera, dès l’envoi de la lettre
recommandée, d’un délai d’un
mois (art. 1730 §3 C.j. nouveau). Ce délai est
censé être celui nécessaire aux parties
pour se concerter quant au principe de la médiation et pour
mettre au point le protocole de médiation si elles
souhaitent tenter l’expérience.
Si la médiation n’est pas mise sur pied, le
délai reprendra son cours un mois après la date
du début de sa suspension.
Si un protocole de médiation conforme aux conditions
requises pour les médiations volontaires est
signé, cette signature suspendra à nouveau la
prescription, cette fois pour la durée de la
médiation (art. 1731§3 C.j.) plus (sauf accord en
sens contraire des parties, un délai de « un mois après la
notification faite par l’une des parties ou par le
médiateur à l’autre ou aux autres
parties de leur volonté de mettre fin à la
médiation. Cette notification a lieu par lettre
recommandée. » (art.
1731§4 C.j.)
Entrée
en vigueur et dispositions transitoires
Afin que la loi puisse être appliquée dans les
meilleurs délais, conscient qu’en pratique des
médiateurs satisfont déjà aux
conditions visée à l’article 1726 de la
loi, le législateur a prévu une
période transitoire d’un an.
Pendant cette période, les instances qui seront reconnues
par la commission fédérale de
médiation comme offrant les garanties suffisantes pour
n’agréer que des médiateurs qui
répondent aux conditions prévues par
l’article 1726, pourront elles-mêmes accorder un
agrément temporaire.
Celui-ci sera valable pendant deux ans. Il est vraisemblable, puisque
la loi prévoit que la commission sera composée de
représentants de la Fédération des
notaires et des Ordres des barreaux, que ces deux instances figureront
parmi les instances d’agrément temporaire.
Cette période transitoire doit permettre aux
médiateurs de solliciter et d’obtenir leur
agrément définitif et individuel de la
commission, ou de se conformer aux critères
d’agrément qui seront
édictés par la commission
fédérale de médiation.
Florence
Van de Putte
Avocat au barreau de Bruxelles
Médiateur agréé - Trialogues
Patrick Van
Leynseele
Avocat au barreau de Bruxelles - Dal
& Veldekens
Médiateur agréé
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